La Commission Nationale Indépendante des Droits de l’Homme du Burundi ne fait pas convenablement son travail selon le Rapporteur Spécial de l’ONU. Fortuné Gaetan Zongo estime que la CNIDH évite les questions ayant une sensibilité politique et se contente des déclarations officielles. Dans son rapport qui sera présenté et débattu dans une semaine au Conseil des droits de l’homme, le Burkinabè semble même ne pas comprendre pourquoi cette commission burundaise des droits de l’homme détient le statut A. (Le Mandat)
Le Statut A de la CNIDH est mis en cause par le Rapporteur Spécial de l’ONU sur la situation des droits de l’homme au Burundi dans son rapport définitif qui sera débattu au cours de la 54ème session du Conseil des droits de l’homme. Le Rapporteur spécial recommande à l’Alliance mondiale des institutions nationales des droits de l’homme de réévaluer le statut A de la Commission nationale indépendante des droits de l’homme, afin de l’encourager à se conformer aux principes de Paris.
Article similaire Burundi : La Commission Nationale des Droits de l’Homme retrouve le Statut A
Selon Fortuné Gaetan Zongo, « contrairement à l’équipe actuelle, la toute première équipe de la Commission Nationale Indépendante des Droits de l’Homme avait semblé faire montre d’un esprit critique et constructif vis-à-vis du Gouvernement et du pouvoir judiciaire ». Il explique que, dans plusieurs cas, l’ancienne équipe avait, par des sorties médiatiques ou des actions de plaidoyer, « interpellé le Gouvernement et ses composantes sur des allégations de violations des droits de l’homme et atteintes à ces droits qui avaient pour la plupart des motivations politiques et dans lesquelles la responsabilité des agents du Service National de Renseignement, de la Police nationale et des Imbonerakure avait été établie ».
A lire aussi Un veilleur de l’Université du Burundi tué par le Service de Renseignement ?
Selon Fortuné Gaetan Zongo, la CNIDH actuelle procède au suivi sélectif des cas de violations des droits de l’homme et ignore les violations ayant une connotation politique. « Si les rapports de la CNIDH constituent une source d’informations sur la situation des droits de l’homme, force est de constater qu’ils occultent des questions ayant une sensibilité politique, notamment les cas de malversations financières, de disparitions forcées, d’arrestations arbitraires, ou les cas de torture opérés par les agents du Service national de renseignement sur des opposants politiques, des professionnels des médias ou des membres d’organisations de la société civile. » Le Rapporteur Spécial estime que la CNIDH fait des activités de promotion et ne dispose pas de marges de manœuvre suffisantes pour engager des activités de protection. « Le rapport de 2022 de la CNIDH ne mentionne pas de cas emblématiques qui ont été dénoncés par les organisations de protection des droits de l’homme et ont fait l’objet d’une mobilisation d’acteurs nationaux et internationaux, comme ceux de Floriane Irangabiye, de Christophe Sahabo ou de Tony Germain Nkina. »
A lire aussi Burundi : A quoi servira un Observatoire de la Presse téléguidé par le CNDD-FDD ?
Fortuné Gaetan Zongo indique également que la CNIDH se fait l’écho des discours officiels. Il cite, à titre d’illustration, la déclaration de la commission lors de la 53ème session selon laquelle la situation politique avait été satisfaisante et les partis politiques avaient fonctionné normalement au cours de l’exercice 2022-2023 alors que, selon le Rapporteur Spécial, « les problèmes internes du Congrès National pour la Liberté, CNL, nécessitent un suivi pour trouver une solution dans les meilleurs délais ».
A lire également Crise au CNL : Les comptes « officiels » du parti sous contrôle des dissidents.
Le Rapporteur Spécial rappelle aussi les confrontations qui ont émaillé le processus de renouvellement de l’équipe actuelle de la CNIDH et « la note du Président de la Commission, Sixte Vigny Nimuraba, adressée au Président de l’assemblée nationale, Gélase Daniel Ndabirabe, divulguée en décembre 2022″. Le Rapporteur spécial relève que cette note, si elle avait vocation à empêcher la nomination de deux commissaires à la tête de la Commission, peut être interprétée comme un indice d’allégeance aux autorités burundaises et d’autopromotion du Président de la Commission. Le Rapporteur spécial note aussi que la nomination de certains membres de la CNIDH n’a pas tenu compte de la composition du bureau exécutif approuvée le 9 janvier 2023 par l’Assemblée nationale. Fortuné Gaetan Zongo rappelle que Consolate Habimana avait obtenu 96 voix contre une voix pour Anésie Mfatiyimana, pour le poste de secrétaire mais que le président Evariste Ndayishimiye a nommé Anésie Mfatiyimana à ce poste. Cette mesure permet de déceler une immixtion de l’exécutif dans la nomination des membres de la Commission selon ce rapport de fin de mandat que le Rapporteur Spécial sur la situation des droits de l’homme au Burundi Fortuné Gaetan Zongo présentera le 22 septembre prochain à Génève d’après le calendrier des activités du Conseil des droits de l’homme de l’ONU. C’est ce Conseil qui décidera d’accorder ou pas un nouveau mandat à ce rapporteur spécial qui n’a toujours pas été autorisé par le gouvernement burundais à se rendre sur son territoire.
A lire dans la même catégorie Quand le Rapporteur Spécial sur le Burundi collecte les informations de première main en Belgique