Ils disent qu’ils n’ont pas célébré les fêtes de fin d’année comme à l’accoutumée. Les militaires et les policiers qui assurent la sécurité du premier ministre du Burundi expliquent qu’ils n’ont pas touché leur solde à la fin du mois de décembre. Selon les informations recueillies par l’agence de presse Le Mandat, le premier ministre Gervais Ndirakobuca accuse sa garde de s’adonner à l’ivrognerie et au vagabondage sexuel. (Le Mandat)
La garde du premier ministre Gervais Ndirakobuca alias Ndakugarika est composée de policiers de l’Appui à la Protection des Institutions « API » et des militaires. Nos sources indiquent que, lorsqu’ils reçoivent leurs salaires, nombreux d’entre eux consomment de la bière sans modération au-delà de la barrière érigée à environ trois cents mètres du domicile du premier ministre dans le quartier Mutanga Sud, commune Mukaza, en mairie de Bujumbura. D’autres militaires et policiers s’adonnent au vagabondage sexuel dans certaines maisons situées aux alentours de l’avenue Siguvyaye selon les mêmes informations. C’est ce qui a poussé le premier ministre à ordonner la suspension, au mois de décembre, des salaires de toute sa garde qui compterait une cinquantaine d’hommes, rapportent nos sources. Certains membres de la garde de Gervais Ndirakobuca indiquent que les grognes ont réellement commencé au bout de la première semaine du mois de janvier. « Nous avons d’abord vu passer le mois de décembre 2022, ensuite a démarré le mois de janvier 2023. Nous n’avions aucune information sur nos salaires. C’est ainsi que certains parmi nous ont commencé à se lamenter. »
Ils ont su qu’ils avaient été « sanctionnés » après la retraite gouvernementale?
En plus de l’absence des salaires, ces militaires et policiers signalent qu’ils ont remarqué d’autres changements au retour du premier ministre de la retraite du gouvernement du Burundi tenue mardi et mercredi à Kayanza, l’une des provinces du Nord du pays. Jeudi, le premier ministre a ordonné le déménagement de la plupart des membres de sa garde vers sa maison d’habitation située à environ trois cents mètres de leur position initiale à la barrière. Cette dernière est actuellement gardée à tour de rôle par une petite équipe de policiers et de militaires. « Actuellement, c’est comme si nous sommes des détenus parce que personne n’est autorisé à aller au-delà de la barrière. On va prendre un verre en cachette à quelques mètres de la barrière parce que l’on ne sait pas exactement qui surveille qui. » nous confie l’un des membres de la garde du premier ministre. « Comme la douche se trouve au niveau de la barrière, tout près d’un contenaire dans lequel nous dormions avant la nouvelle décision, on est obligé de porter sa serviette et parcourir les trois cents mètres en pleine rue pour prendre enfin sa douche. C’est honteux parce qu’il y a d’autres ménages de la population tout autour. »
La réunion de vendredi
Ces membres de la garde du premier ministre indiquent que Gervais Ndirakobuca les a réunis vendredi et les a accusés de « se souler et d’aller chercher les femmes » lorsqu’ils obtiennent leurs salaires. « Il était en colère ce jour-là. C’est le même jour que nous avons su qu’il était à l’origine du blocage de nos salaires de décembre. Il nous a dit qu’en ce qui concerne les salaires, nous devions attendre pour voir si notre insolence allait disparaître. »
L’une de nos sources signale aussi que la fréquence de distribution de la viande, pour améliorer la ration alimentaire composée le plus souvent du riz et du haricot, a été modifiée parce que certains militaires et policiers la vendaient par après. « Auparavant, on nous donnait 8 corned-beef une fois le mois mais aujourd’hui on nous les donnent en 8 tranches. Donc, un seul corned-beef sur demande jusqu’à atteindre 8 pièces au bout du mois. »
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Le premier ministre du Burundi Gervais Ndirakobuca alias Ndakugarika a proféré des intimidations et des menaces envers un journaliste de l’Agence de Presse Le Mandat lorsqu’il l’a joint à son téléphone portable. Lieutenant Général de Police Gervais Ndirakobuca a dit au journaliste qu’il s’engageait sur « un terrain glissant » lorsqu’il s’est présenté et posé la première question sur les grognes des militaires et des policiers de sa garde en rapport avec des salaires « impayés ». L’interview a été faite en Kirundi et nous avons fait une traduction libre commençant par la réponse du premier ministre à la première question.
« Attention mon frère, ton médium opère au Burundi? »
Le Mandat : Nous opérons à travers les réseaux sociaux.
Gervais Ndirakobuca : Attention mon frère … tu te diriges vers un terrain glissant. Ces informations que tu cherches, tu te diriges tout droit vers un terrain glissant.
Le Mandat : Mais, ce qu’ils ont dit n’est pas vrai?
Gervais Ndirakobuca : Tu es entrain de déraper mon frère!
Le Mandat : Pourquoi?
Gervais Ndirakobuca : Est-ce qu’ils t’ont demandé de réclamer pour eux?
Le Mandat : Non. Nous avons eu l’information et maintenant je suis entrain de l’exploiter.
Gervais Ndirakobuca : Est-ce que tu vas citer le nom de celui qui t’a demandé de faire la réclamation?
Le Mandat : Non.
Gervais Ndirakobuca : Si tu ne donnes pas son nom, c’est toi qui va y rester.
Le Mandat : Non. C’est impossible de donner leurs noms. Ils nous ont donné l’information parce qu’ils nous font confiance.
Gervais Ndirakobuca : C’est impossible? Le chemin que tu as emprunté est un cul-de-sac mon frère, fais attention. Je pense d’ailleurs que tu t’es adressé à la mauvaise personne. Moi, je ne suis pas responsable de ces gens. Est-ce que c’est moi qui les dirige?
Le Mandat : Ils disent que c’est vous qui avez bloqué leurs salaires.
Gervais Ndirakobuca : Attention mon frère … Est-ce que tu sais comment les institutions de l’Etat fonctionnent?
Le Mandat : Oui.
Gervais Ndirakobuca : Si tu le sais, comment alors le premier ministre est-il concerné par cela? C’est le ministre de l’armée ou de la police?
Le Mandat : Mais lorsque vous portez des allégations à leur égard, qui transmet le rapport?
Gervais Ndirakobuca : D’ailleurs les ministères en charge de l’armée et de la police ne sont pas concernés par leurs salaires. Il y a des services qui leur donnent les salaires. Vous dites que les membres de ma garde sont sous ma responsabilité? Ils ont leurs autorités de tutelle.
Le Mandat : Est-ce qu’ils auraient reçu leurs salaires respectifs à la fin du mois de décembre?
Gervais Ndirakobuca : Je ne peux pas savoir s’ils ont été payés ou pas parce que ce n’est pas moi qui leur donne les salaires. Comment puis-je être au courant? Comment moi je peux être au courant? Cela figure-t-il dans mon cahier de charges?
Le Mandat : Ils disent que vous avez tenu une réunion vendredi pour leur expliquer pourquoi ils n’ont pas eu leurs salaires.
Gervais Ndirakobuca : Moi?
Le Mandat : Oui.
Gervais Ndirakobuca : Ce n’est pas vrai mon frère. Arrête d’exploiter des rumeurs. Et je crois que tu n’est pas au Burundi, je crois que tu es à Kigali.
Le premier ministre du Burundi Gervais Ndirakobuca nous a ensuite raccroché au nez.