Mercredi, l’Assemblée Générale de l’ONU a voté contre l’annexion par la Russie de certains territoires de l’Ukraine. 143 voix pour, 5 voix contre (la Russie, le Bélarus, la Syrie, la Corée du Nord et le Nicaragua) et 35 abstentions. Le Burundi s’est abstenu mais ce pays situé au coeur de l’Afrique a voté une fois pour la Russie dans cette guerre qui dure environ sept mois déjà. (Le Mandat)
C’était le 7 avril dernier, lorsqu’au sein de la Communauté Est-Africaine, seul le Burundi a voté contre la suspension de la Russie au Conseil des Droits de l’Homme de l’ONU. D’autres votes auxquels il a participé, le Burundi s’est abstenu. Pourtant, lors de la présentation du bilan des réalisations de son ministère au troisième trimestre, exercice 2021-2022, le 3 mai dernier, le ministre burundais des affaires étrangères a souligné que le gouvernement du Burundi prenait une position abstentionniste puisqu’il ne savait pas comment cette guerre en Ukraine allait évoluer. Albert Shingiro n’a pas évoqué le vote contre la suspension de la Russie au Conseil des Nations Unies aux Droits de l’Homme.
En revanche, l’un des rares partis de l’opposition burundaise à s’être exprimé sur le sujet, le MSD, se positionne clairement pour l’Ukraine. Pour le président du Mouvement pour la Solidarité et la Démocratie, il s’agit d’une guerre qui oppose le camp de la démocratie et la liberté au camp de l’autocratie et du totalitarisme. Alexis Sinduhije n’hésite même pas à comparer l’invasion de l’Ukraine par la Russie à la situation qui prévaut au Burundi. « Les douleurs des Ukrainiens sont similaires aux douleurs que les Burundais ressentent aujourd’hui. Le pays des Burundais est sous occupation. Il est occupé par ceux qui les tuent, les exilent, leur infligent l’injustice de la même manière que les Ukrainiens. Nous demandons que nos lamentations soient prises en considération par le monde entier comme c’est le cas pour l’Ukraine ».
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La position de certains pays africains par rapport à la guerre en Ukraine préoccupe l’un de leurs principaux partenaires, l’Union Européenne. Dès les premiers votes aux Nations Unies, l’Union Européenne semble avoir été surprise par l’attitude de certains pays africains qui s’abstenaient tandis que d’autres votaient même contre les sanctions à l’égard de la Russie. Certains membres du comité de développement du parlement européen ont soulevé leurs inquiétudes le 10 mai dernier dans une réunion avec la commissaire européenne chargée des partenariats internationaux Jutta Urpilainen. Se basant sur les résultats des votes aux Nations Unies, la députée Hildegard Bentele estimait qu’il y avait des divergences politiques réelles entre l’Union Européenne et les pays africains qui nécessitaient un dialogue sincère. « Concernant la Russie, la décision à l’assemblée générale de l’ONU, le 2 mars, nous a permis de voir que 24 pays africains se sont abstenus et 9 ont voté contre l’exclusion de la Russie du Conseil des Droits de l’homme. Où sont nos valeurs? », a lancé l’Allemande. De son côté, le Luxembourgeois Charles Goerens signalait que de nombreux pays africains avaient choisi le camp de la Russie, le pays qui écrase les autres au détriment des valeurs de partenariat auxquelles ces pays africains ont souscrites avec l’Union Européenne. « Les Russes ont une stratégie claire de nous faire apparaître comme des malfaiteurs aux yeux des Africains ».
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Face à ces inquiétudes, la commissaire Jutta Urpilainen a temporisé. Pour elle, il ne faut surtout pas créer une situation où il y a le bloc de l’Occident et celui du reste du monde. Tout en promettant que le dialogue sur cette question allait se poursuivre en permanence, Jutta Urpilainen a expliqué que les pays africains n’étaient pas contre l’Union Européenne mais qu’ils avaient d’autres raisons expliquant leur attitude dont celles liées à l’histoire.